conférences-sahiv-2023
10 janvier 2023, 14h30, musée des beaux-arts
Bertrand YEURC'H, La compétition entre les barons de Vitré et ceux de Rohan pour la prééminence aux états de Bretagne de 1451 à 1789
Après avoir rappelé la genèse du système des barons d’états mis en place par le duc Pierre II en 1451, nous étudierons successivement les aspects légaux de la compétition entre les barons de Vitré et ceux de Rohan pour le rang de premier barons aux états de Bretagne, la réalité du terrain pour la présidence de l'ordre de la noblesse aux états de Bretagne jusqu'à la Révolution et enfin les prétentions au rang de princes étrangers à la cour de France qui en dérive.
Pseudo charte d'Alain Fergent réglant le rang des évêques et des barons lors des états de Bretagne, 1087 (arch. dép. Loire-Atlantique, E 132-1)
Le duc de Bretagne en son parlement (bois gravé inséré à plusieurs reprises dans les Grandes croniques de Bretaigne d'Alain Bouchart, 1514)
Ouverture des états de Bretagne (extrait de la Description historique, topographique et naturelle de l'ancienne Armorique de Christophe-Paul de Robien, Jean-François Huguet del., 1756
28 février, 14h30, amphithéâtre des archives départementales
Initialement annoncées le 7 février au musée de Bretagne, l'AG et la conférence sont repoussées au 28 février en raison du contexte social du moment et déplacées aux archives départementales
Assemblée générale
Stéphan HINGUANT, Occupations humaines et paléoenvironnement durant le Dernier Maximum Glaciaire : la grotte Rochefort et le refuge du canyon de Saulges (Mayenne)
La grotte Rochefort et d’autres grottes de la vallée de l'Erve (Mayenne), témoignent d'occupations aux confins septentrionaux de l'aire d'extension du Solutréen (Paléolithique supérieur). Elles traduisent l'adaptation de ces groupes humains aux rudes conditions qui prévalaient durant le Dernier Maximum Glaciaire au nord de la Loire, entre 24 790 cal BP et 21 970 cal BP. Rarement observé dans de telles conditions, le Solutréen de la grotte Rochefort compose une entité archéologique dont l’étude suggère que la zone fouillée correspond à la périphérie d’une ou plusieurs occupations. Dans un bilan sédimentaire moyen de 0,60 m d'épaisseur, le corpus mobilier compte plus de 8 000 objets dont environ 5 500 restes osseux, 2 000 pièces lithiques taillées et 300 plaquettes gravées.
Le site révèle une faune froide majoritaire, avec un spectre large où dominent le renne et le cheval. L'identification d'une microfaune froide caractéristique d'un biotope steppique, au côté de rongeurs inféodés à des milieux tempérés-humides, comme les restes végétaux carbonisés, confirment une restitution paléoenvironnementale qui peut s'apparenter à un refuge cryptique septentrional, véritable niche écologique durant le Dernier Maximum Glaciaire.
Toutes les pièces que compte l'assemblage lithique ont été apportées dans l’enceinte de la grotte après débitage et sont en outre réalisées dans des matériaux exogènes, les gîtes primaires les plus proches du site se trouvant à 10 km. Associées à l’industrie osseuse, les longues lames régulières en grès lustré ou les proportions originales des « feuilles de laurier », composent un assemblage mobilier tout à fait singulier.
Sur le plan paléo-ethnologique enfin, le site révèle un art mobilier exceptionnel comptant de nombreuses plaquettes gravées portant des figures animales, anthropomorphes ou signes abstraits, corpus inédit en France pour la période, qui s'accompagne d'un art sur os et d'éléments de parure comprenant également des pièces uniques pour le Solutréen.
Objets d’une publication monographique récente, les données de la fouille de la grotte Rochefort constituent aujourd’hui une référence majeure du Paléolithique supérieur français. La conférence s’attachera à en présenter l’essentiel et à replacer le site dans ce contexte chronologique.
Grande lame en grès lustré (© Stéphan Hinguant et H. Paitier)
Mandibule de bouquetin alpin (© C. Bemilli)
14 mars, 14h30, musée des beaux-arts
Vincent LAUNAY, Les enquêtes royales de 1235 en Bretagne, entre réparation judiciaire et communication politique
En novembre 1234, après plusieurs années d’une guerre entrecoupée d’une trêve menée contre le roi de France et ses alliés, le duc de Bretagne Pierre de Dreux se soumet définitivement à Louis IX. L’été suivant, le souverain octroie une série de neuf enquêtes aux aristocrates du duché qui lui ont apporté leur soutien. Ces enquêtes ont pour principal objet de désigner les griefs que nobles et ecclésiastiques du nord du duché expriment à l’endroit de leur duc. Ceux-ci sont de deux ordres : si certains reproches remontent à loin, aux années 1210 et suivantes, quand Pierre de Dreux imposait son autorité aux barons bretons, les autres sont beaucoup plus récents et visent les exactions commises par le duc, ou ses hommes, durant la trêve mise en œuvre à partir de juillet 1231. L’analyse de ces enquêtes permet de révéler un paysage féodal au sein duquel les tensions autour du droit coutumier sont éclairées d’un jour nouveau. Pourtant, malgré la gravité des faits opposés à Pierre de Dreux, force est de constater qu’il conserve la plupart de ses prérogatives. Ce sont donc les motivations du roi Louis IX à diligenter cette série d’enquêtes qu’il conviendra d’interroger comme instrument de communication politique.
Pierre de Dreux (vitrail de la cathédrale de Chartres)
9 mai, 14h30, musée des beaux-arts
Olivier MICHEL, Entreprise de faux monnayage à la Monnaie de Rennes à la fin du XVIe siècle
Des monnaies ont été frappées à Rennes depuis l’époque des Redones, peuplade celte, jusqu’en 1772, date de fermeture de l’atelier monétaire. Pour assurer l’homogénéité des espèces circulant dans le royaume, en particulier d’or et d’argent, tous les ateliers (18 sous Henri III) devaient respecter les édits du roi. Les officiers des Monnaies étaient chargés de les faire appliquer, alors que les tentations de fraude étaient grandes, mais risquées, pour le maître, responsable de la fabrication. Astreints à venir travailler dès que du métal à monnayer arrivait, les employés bénéficiaient de privilèges importants et enviés. Le faux-monnayage, crime de lèse-majesté, était passible de pendaison. Comment une monnaie, apparemment authentique, a-t’elle pu être frappée en 1580, alors que tous les documents officiels, tant de Rennes que de Paris, n’en font aucune mention ?
L'atelier monétaire de Strasbourg en 1580 (vitrail de l'exposition permanente de la Monnaie de Paris; cl. O. Michel)
13 juin, 14h30, musée des beaux-arts
Simon GUINEBAUD, Dinan, place de guerre au XVIIe siècle
Durant la première moitié du XVIIe siècle, la ville de Dinan va non seulement échapper aux différentes campagnes de démantèlement et de démilitarisation des places-fortes que connaît alors la Bretagne mais au contraire bénéficier de divers travaux de réparation et de modernisation de son enceinte. Parallèlement, des gouverneurs particuliers issus de familles prestigieuses, le maintien d'une garnison royale ainsi que la permanence d'un arsenal municipal, vont conforter, durant tout le règne de Louis XIII, la dimension militaire d'une cité que les lettres d'octrois qualifient alors, et jusqu'aux années 1680, de "place frontière".
La mise au jour de sources inédites - provenant majoritairement des archives de la Chambre des comptes de Nantes - permet en effet de réinterroger l'historiographie traditionnelle qui fait de la guerre de la Ligue le "chant du cygne" du rôle stratégique de la ville et de repousser au milieu des années 1670, soit au moment de la révolte du papier timbré, la démilitarisation effective de la place de guerre de Dinan. Coïncidence ?
Plan des Ville et Château de Dinan en Bretagne avec partie de ses environs (Simon Garengeau, 3 janvier 1701; SHD - GR1-VH-2224)
10 octobre, 14h30, musée des beaux-arts
Yves BRETON, Le chanoine Amédée Guillotin de Corson : des origines familiales aux premières publications
Personnalité incontournable de l’historiographie bretonne de la seconde moitié du XIXe siècle, la chanoine Amédée Guillotin de Corson (1837-1905), est l’auteur d’une étonnante production d’articles et d’ouvrages consacrés à toute la Bretagne. Le point d’orgue de cet immense travail est sans contestation possible le Pouillé historique de l’archevêché de Rennes, paru en six volumes de 1880 à 1886 et qui reste de nos jours une référence incontournable. Cet érudit fut membre de la plupart des sociétés savantes de la province et y collabora régulièrement. On relève cependant à ses débuts, dans la décennie 1860 quelques travaux plus modestes et de portée limitée qui s’expliquent par le contexte général qui encourage l’histoire locale mais surtout par des circonstances propres à celui qui n’était encore que simple vicaire à La Noë-Blanche. Ses origines familiales et son parcours personnel ont largement imprégné ses premières recherches. Ce seront les thèmes abordés par cette intervention.
14 novembre, 14h30, musée des beaux-arts
Françoise LE BOULANGER, Elsa JOVENET, Un territoire et ses habitants de l’Antiquité à l’époque moderne : le Bourg-Saint-Pair à Bais
Depuis les années 1980, l’histoire du village de Bais, situé à une quinzaine de kilomètres au sud-ouest de Vitré, se révèle au fur et à mesure des découvertes effectuées par les prospecteurs et les archéologues. Si le lieu est mis en valeur durant la Protohistoire, c’est à partir du début du Ier siècle de notre ère que l’occupation s’intensifie, avec l’implantation d’une grande « villa », d’autres constructions, ainsi que d’une nécropole à incinérations. Le réseau viaire se développe également, en lien avec la voie Rennes-Angers qui passe à quelques kilomètres plus au sud. L’occupation continue durant les premiers siècles du Moyen Âge. Elle nous est essentiellement révélée par la création de deux espaces funéraires à 400 m l’un de l’autre. Le premier, implanté au niveau de l’église paroissiale, est mal renseigné. Au contraire le second, largement exploré grâce à trois opérations archéologiques entre 1986 et 2021, a livré plus de 500 sépultures installées entre le IVe siècle et les XVe-XVIe siècles. Ce corpus offre l’opportunité d’étudier l’évolution des pratiques funéraires au fil des douze siècles de son occupation, mais aussi l’état sanitaire de sa population. L’étude spatiale du cimetière permet de comprendre son organisation et d’identifier ses spécificités telles qu’un secteur dédié aux jeunes enfants et un probable calvaire. Aux alentours des XIe-XIIe siècles, une chapelle y est construite sous l’obédience de l’abbaye Saint-Melaine de Rennes qui y installe un prieuré. Utilisée jusque dans le courant du XVIIe siècle, elle est déjà largement démantelée quand elle est vendue comme bien national en 1793. La conférence s’attachera à présenter l’essentiel des résultats issus des différentes recherches.
Bais, Bourg-Saint-Pair, chapelle Saint-Pierre (F. Le Boulanger / E. Jovenet, Inrap)
12 décembre, 14h30, musée des beaux-arts
Witold RAWICKI, Processus d’identification historique par l’architecture : le cas de la basilique Saint-Sauveur de Rennes
La basilique Saint-Sauveur de Rennes occupe un site à caractère sacré depuis un millénaire mais dont une charnière se situe au XVIIe siècle au moment de la création d’une nouvelle paroisse. C’est à cette époque que la décision radicale de sa reconstruction est décidée en remplacement d’un sanctuaire plus ancien voué à la destruction.
Appréhender l’architecture de la basilique Saint-Sauveur par l’analyse de son style n’offre qu’une illustration partielle, quoique remarquable, de l’histoire des arts. Pour approfondir sa connaissance, il semble pertinent de l’inscrire dans la perspective des objets dont la vocation est la représentation symbolique. Bien entendu, il s’agit d’un monument sacré mais il est aussi l’incarnation institutionnelle d’une communauté, et en définitive la résultante du choix opéré pour sa représentation. Celle-ci est religieuse mais aussi civile, au sens où elle s’adresse à la cité.
Depuis le miracle de 1357, de l’incendie de 1720 à la Révolution Française, du XIXe siècle où la recharge sacrale convoque à nouveau les grands mythes fondateurs, jusqu’au XXe siècle pendant lequel le sanctuaire est érigé en basilique, l’architecture et le décor de Saint-Sauveur expriment et interrogent les différents partis pris de représentation symbolique. C’est la question que nous posons lors de cette présentation, qui est celle de comprendre comment l’architecture relève et participe à la formation de l’identité d’un sanctuaire.